La Fête à Michel Raimbaud au Musée des Beaux-Arts de Nantes
Dans le grand hall d’exposition du prestigieux Musée des Beaux-Arts de Nantes, les gabares et peaux de vaches de Michel Raimbaud composent jusqu’en septembre une étrange et fascinante fête. J’y étais avant les trois coups. Les acteurs du Théàtréquipe « La Chamaille » répétaient-, les uns derrière les projecteurs, d’autres accrochés aux vergues des gabares, de merveilleux poèmes, quelques-uns vietnamiens, qui chantaient la joie d’être, de vivre et d’aimer dans cet oasis qu’est devenu, pour plus de trois mois – et trois mois de vacances ! – le Musée des Beaux-Arts.
Je croyais connaître l’univers de Michel Raimbaud, et il est vrai que je remarquais ici et là des œuvres familières, découvertes naguère à l’ Abbaye Sainte-Croix, mais il y avait en plus ce Grand Trône de cuir et de bois, offert à je ne sais quel empereur noir, sorti tout chamarré de nos livres d’enfants, et surtout la plus folle, la plus gigantesque des gabares, hissant ses haubans à une douzaine de mètres de hauteur et habitée, mais oui, de bizarres, douces et inquiétantes formes humaines, silhouettes féminines que l’œil surprend, perd, cherche à nouveau, retrouve et ne lâche plus.
Je vous le dis, c’est une fête. Mais soyons sérieux. Vous qui avez vu hier les enfants peupler chaque jour la gabare élevée, au péril des marées montantes, sur la plage des Sables, non loin de la cabane de l’Office du Tourisme, vous avez souri de l’idée, Mais avez-vous pris conscience de la force, de l’évidence tellurique, prodigieuse, de cette idée, Elle a trouvé à Nantes un cadre à sa dimension et je ne saurais trop conseiller aux Sablais d’aller sur place s’en rendre compte. Il s’agit, bien plus que d’une affirmation, d’une consécration. La « gabare » est désormais une forme d’expression ayant obtenu ses lettres de noblesse, prête aujourd’hui, depuis le grand port de Nantes, où rêva et d’où s’évada Jules Verne, pour toutes les aventures.
Jean Huguet
Le Journal des Sables – le 16 juin 1979 –